Projet urbain : Projet urbain : entretien avec Gaël Perdriau

Le maire de Saint-Étienne, Gaël Perdriau, décrypte le projet urbain et annonce une série de grandes concertations sur des places et sites emblématiques du centre-ville.

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Pourquoi un projet urbain ?

Gaël Perdriau : Un projet urbain permet d’imaginer la ville à moyen et long terme. C’est indispensable pour répondre aux besoins des habitants. Il permet aussi d’anticiper et de nous préparer aux grandes évolutions comme le changement climatique ou les mutations économiques. 

Ces démarches s’inscrivent dans un temps long. La ville qu’on façonne aujourd’hui a été pensée il y a plusieurs années. À titre d’exemple, les nombreux chantiers en cours à Saint-Étienne sont le fruit de décisions prises en 2014 ou 2015. 

Notre rôle à nous, élus, est de préparer l’avenir. En nous appuyant sur les attentes des habitants que nous rencontrons au quotidien.

En prenant en compte, aussi, les grandes tendances de la société, que nous révèlent des études comme celles produites par l’agence d’urbanisme Épures, sur le logement, les mobilités, les loisirs et, sous un angle plus général, les manières de vivre la ville.

Comment élaborer un projet urbain ?

Gaël Perdriau : D’abord, il est la traduction d’une dynamique. Saint-Étienne change. Je n’ai de cesse de le répéter, mais c’est une réalité. 

C’est une fierté, aussi, de voir notre ville s’embellir, notre cadre de vie s’améliorer. Ensuite, il y a notre volonté et notre vision politiques. 

Nous, élus, avons le devoir de penser la ville pour les 30 ou 40 années à venir. 

Nous définissons les grandes orientations, aidés par les études et les recherches prospectives. Orientations que nous confrontons aux idées et attentes des habitants. 

C’est le sens des quelque 150 réunions de concertation et ateliers thématiques organisés depuis le début du mandat, et qui permettent d’enrichir notre copie. 

Ce projet, enfin, doit être réaliste. On le confronte aux spécificités de notre ville (collines, rues étroites dans l’hypercentre…), aux contraintes des finances publiques. 

Puis, on passe à sa mise en oeuvre. Cela nécessite de trouver des partenaires institutionnels.

Quels partenaires institutionnels et pourquoi ils investissent ?

Gaël Perdriau : Je pense à l’Anru, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, une agence d’État, dont la directrice générale était à Saint-Étienne mi-janvier. 

Nous nous sommes battus pour signer avec l’Anru, en 2019, un important projet de renouvellement urbain qui mobilise près de 210 M€ à l’échelle de la Ville d’ici 2026, sur les quartiers de Montreynaud, Tarentaize-Beaubrun et La Cotonne. 

Il y a aussi l’Épase, dont l’État est actionnaire à 50 %. L’Épase mobilise 100 M€ pour intervenir sur notre ville, dans des quartiers comme le Crêt-de-Roc, Neyron- Châteaucreux, Plaine Achille. 

Je pense, encore, à Épora, l’Établissement public de l’Ouest Rhône-Alpes, qui traite nos friches. 

Je n’oublie pas, enfin, les bailleurs sociaux et partenaires privés, lesquels, au regard de la dynamique engagée depuis 2014, prennent le relais de l’investissement public. Tous ces partenaires croient en notre projet et en sa capacité à changer le quotidien des habitants. 

La preuve : ils investissent à nos côtés. Pour les convaincre, encore faut-il avoir une vision politique claire de la ville de demain et un plan d’actions. C’est le sens du projet urbain.

Doit-on s'attendre à une pause dans les aménagements urbains ?

Gaël Perdriau : Certainement pas. Ce serait, pour moi, une terrible erreur. Nous avons rattrapé le retard accumulé sur d’autres villes. Mieux encore, nous sommes en avance sur certains points. 

Cesser d’avancer, c’est reculer. 

C’est pourquoi je me suis battu, à l’échelle de la Métropole, pour doubler la capacité d’investissement. Et pourquoi j’ai défendu, à Saint-Étienne, le maintien d’un haut niveau d’investissement, même si cela a nécessité une augmentation des impôts sur l’année 2024. Cet effort est indispensable pour préserver la dynamique actuelle. 

Les projets de transformation de la ville attirent les habitants, les partenaires privés et renforcent l’élan positif.

Que prévoit le projet urbain pour les lieux qui rassemblent ?

Gaël Perdriau : La première richesse de Saint-Étienne, ce sont les Stéphanois ! Nombre de visiteurs qui débarquent dans notre ville pour la première fois nous le répètent souvent. 

Nous souhaitons cultiver cette chaleur humaine et ce vivre-ensemble par une attention toute particulière portée à nos lieux de socialisation. 

Là où l’on se retrouve pour apprendre, se cultiver, faire du sport.

Je peux déjà vous annoncer un Plan écoles 2, au profit de nos 69 écoles publiques

Nous avons consacré 40 M€ à rénover nos 69 écoles sur ce mandat. C’est le double de ce que nous avions mobilisé entre 2014 et 2020. 

Mais ce n’est pas suffisant. Il nous faut encore investir. Nous interviendrons également sur nos équipements sportifs et culturels. 

Je rappellerai, dans ce cadre, la centralisation du pôle patrimonial au sein de l’immeuble Loubet réhabilité, la construction d’un pôle enfance jeunesse à Montreynaud ou encore de nouveaux locaux pour le centre social du Babet.

Quels succès récents vous inspirent pour l’avenir ?

Gaël Perdriau : Je prendrai trois exemples. 

D’abord, le jardin Éden. Nous avions une friche depuis 20 ans. Nous avons décidé de la dépolluer, de la démolir pour en faire 2 000 m2 d’espaces verts en centre-ville. Et ce, après de nombreuses concertations. 

Ensuite, la friche du quotidien « Le Progrès » à Bergson. On l’a rachetée, dépolluée, vendue à un promoteur qui a construit 60 logements en copropriété. Nous avons ainsi répondu au besoin d’une partie de la population en logements de qualité, tout en générant une recette pour la Ville. 

Enfin, troisième exemple, Loti. Hier, c’était un centre commercial abandonné. Qu’on a racheté, démoli pour aménager une zone d’activités et accueillir 11 entreprises, à qui nous avons donné les moyens de se développer, et plusieurs centaines d’emplois. 

Trois opérations emblématiques de notre méthode et de notre stratégie. Et la preuve que l’une et l’autre fonctionnent.

C’est un peu régénérer la ville...

Gaël Perdriau : C’est exactement cela. Pour, finalement, aboutir à une ville qui a inversé la tendance démographique et regagne des habitants. Qui a attiré 10 000 habitants de plus ces dix dernières années. Qui a pris sa place dans le concert des grandes métropoles françaises. 

Une ville unanimement reconnue comme la capitale française du design et qui, sans rougir, s’est permise d’accueillir la Coupe du Monde de rugby 2023 et les Jeux Olympiques et Paralympiques 2024.

Comment aller plus loin ?

Gaël Perdriau : Dès 2014, nous avons convaincu les bailleurs sociaux de faire une pause dans la construction de logements et de consacrer leurs moyens à la réhabilitation de leur parc de logements sociaux. 

Résultat : un taux de vacance en large baisse depuis. Et des logements qui, en nombre, ont bénéficié de rénovations énergétiques. 

Nous souhaitons poursuivre une stratégie qui gagne. 

  • Un, démolir les tènements insalubres et sans intérêt patrimonial. 35 hectares ont été démolis depuis 2014 pour reconstruire ou aérer la ville. 
  • Deux, continuer à accompagner la rénovation des logements, comme nous l'avons fait sur près de 10 000 logements publics et privés depuis 2014. 
  • Trois, préserver notre patrimoine architectural en soutenant les propriétaires avec le Plan façades. 
  • Quatre, prendre soin de nos espaces publics, de leur accessibilité pour tous, et le design, à Saint Étienne plus que dans n’importe quelle autre ville, est un moyen d’y parvenir.

Comment envisagez-vous l'évolution du centre-ville ?

Gaël Perdriau : Ces 10 dernières années, aucun quartier de la ville n’a été oublié. Certains n’avaient
pas vu d’investissement public depuis 30 ou 40 ans. Le centre-ville a été traité au même titre que les autres. Mais il est vrai qu’il est un cas à part. 

C’est un point de rencontre. Il concentre les commerces, les services administratifs. C’est ici qu’on vient célébrer nos plus belles victoires. Beaucoup d’argent y a été investi avant 2014. 

J’estime que le temps est venu de projeter le réaménagement des places du centre-ville

Même s’il y avait des choses à redire, il n’aurait pas été raisonnable (ni compris) de tout casser quelques années après. J’estime aujourd’hui ce délai révolu et que le temps est venu, pour accompagner la dynamique de changement lancée à l’échelle de la ville, de projeter le réaménagement de nos grandes places de centre-ville.

Quel est le projet ?

Gaël Perdriau : D’abord, écouter les Stéphanois ! Je souhaite lancer une grande concertation sur ce sujet. Ces places répondent à de multiples usages. 

Notre rôle est de les concilier, tout en poursuivant un objectif à la fois fonctionnel et esthétique. 

Donnons donc la parole à chacun, sans a priori, avant d’agir.

Quelles places seront concernées ?

Gaël Perdriau : Du nord au sud, et comme nous l'avons fait sur la place Carnot, seront concernées les places Hôtel-de-Ville, Dorian et Peuple. 

Nous avons, là, une opportunité unique d'essayer de créer une cohérence d’ensemble qui redonnera du caractère au centre-ville, en lien avec le plan façades et toute la stratégie de reconquête des rez-de-chaussée commerciaux vacants.

Mais c’est un projet à très long terme ?

Gaël Perdriau : Oui, bien sûr. Ce sont des investissements considérables, et des opérations qui peuvent prendre plusieurs années. Mais qu’il faut bien démarrer un jour. 

J’estime que c’est le moment, pour poursuivre notre dynamique de changement.

Quel projet pour le parking des Ursules ?

Gaël Perdriau : Au moins, nous sommes en mesure de nous poser la question ! Une délégation de service public nous a liés à un opérateur de stationnement pendant 45 ans. Je n’ai pas souhaité la renouveler. 

Aux Ursules, la Ville est donc désormais maître de son destin. C’est pourquoi, sur ce sujet, je souhaite aussi ouvrir une concertation. Globalement, nous avons deux options : démolir ou réhabiliter. Et là encore, je souhaite ouvrir l’intégralité du sujet à la discussion. Avec tous les enjeux et toutes les contraintes que nous avons identifiés. 

Et, vous le lirez dans le « projet urbain », les contraintes sont nombreuses.

Quel projet pour le site de la Charité ?

Gaël Perdriau : Nous sommes un peu dans la même configuration. Et là aussi, je veux donner la parole aux Stéphanois. D’abord, n’oublions pas que le site appartient toujours au Centre hospitalier universitaire (CHU), qui projette de le quitter en 2027. Nous avons insisté pour que le CHU ne le vende pas à un promoteur. La Ville va donc en devenir propriétaire cette année. 

Ensuite, ces deux dernières années, nous avons mené une étude avec l’architecte des bâtiments de France pour connaître la valeur patrimoniale des bâtiments, ceux qu’il faut absolument garder, ceux que l’on peut réhabiliter, ceux qu’il serait préférable de démolir. Nous avons donc, désormais, toutes les cartes en main. 

Ce projet est aussi présenté dans les colonnes du projet urbain.

Comment le projet Cité 2025 va faire évoluer le quartier ?

Gaël Perdriau : Les travaux ont en effet débuté du côté de la Cité du design, notamment pour accueillir la Galerie nationale du design, que l’État a décidé d'implanter à Saint-Étienne. 

Tout autour, le quartier se développe avec ses institutions culturelles (Comédie, Fil, Zénith), son campus (Ésad Saint-Étienne, université Jean-Monnet), ses locaux à usage économique dédiés aux industries culturelles et créatives (Mixeur, Grande usine créative), un grand parc (François-Mitterrand)

Nous voulons donc profiter de la dynamique Cité du design 2025 pour affirmer et structurer, autour de la Cité, un District créatif dont nous avons tous les ingrédients, à l’instar de ce que l’on peut trouver à Montréal (Quartier des spectacles) ou Barcelone (Poblenou District). 

Notre ambition, dans la seule ville française créative design Unesco, est ni plus ni moins d’embarquer tous les habitants de ce District créatif pour imaginer, ensemble, un prototype de la ville de demain, dans une démarche d’innovation sociale.

Que faire de plus pour les déplacements et les mobilités ?

Gaël Perdriau : Nous souhaitons davantage ouvrir nos quartiers sur la ville. C’est par exemple le sens du projet de ligne de transports en commun M6+ qui va relier, en partie en site propre, La Métare à la Cité du design via le cours Fauriel et Jules-Janin. 

Partout où c’est physiquement possible, nous continuerons à créer des pistes cyclables comme nous l’avons fait sur les boulevards Alexandre-de-Fraissinette ou du Colonel- Marey

La configuration collinaire et nos rues étroites de centre-ville, reconnaissons-le, ne facilitent pas les aménagements cyclables. 

L’une des réponses apportées a été la zone 30, dont nous avons triplé la surface. Enfin, nous ferons tout, malgré les mêmes contraintes, pour faciliter et sécuriser les flux piétons, dont on sait qu’ils représentent 55 % des déplacements des Stéphanois. Tous les Stéphanois.

Quelles actions en faveur du commerce ?

Gaël Perdriau : On assiste, comme dans toutes les villes, à une modification des comportements
 consommateurs. À une augmentation exponentielle du chiffre d’affaires du commerce électronique. Et ce sont bien les consommateurs qui font le commerce. 

Notre stratégie vise à adapter notre tissu commercial à cette nouvelle donne.

Nous allons d’abord poursuivre le travail de reconquête des rez-de-chaussée vacants. 

Je rappelle que la Ville et l’Épase ont décidé la création d’une société foncière pour racheter et réhabiliter des locaux commerciaux avant de les remettre sur le marché, et que cette démarche a permis plusieurs installations. 

Que nous avons lancé un plan « urbanisme commerce » qui définit une zone de commercialité au sein de laquelle nous aidons les commerçants à rénover leurs locaux, et au-delà de laquelle nous accompagnons la mutation des locaux en rez-de-chaussée vers d’autres usages. 

Et que nous avons ouvert l’Office du commerce pour accompagner les porteurs de projets.

Comment concilier urbanité et ruralité ?

Gaël Perdriau : La Ville ne vit évidemment pas en autarcie dans ses frontières. Les flux, déplacements, échanges sont permanents avec les autres communes de la Métropole. C’est pourquoi il est contre-productif d’opposer la ville centre et les communes voisines. 

Nos destins sont liés. Saint-Étienne jouera pleinement son rôle de pôle de centralité, de moteur humain, social, culturel et économique pour emmener avec nous l’ensemble du territoire.

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  • Saint-Étienne

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