Saint-Étienne, la cible "Z 816"
La ville de Saint-Étienne est enregistrée, en janvier 1944, sur les cartes d’état-major des alliés comme étant la « Cible Z 816 ». Un objectif, parmi d’autres de notre région, comme Chambéry, Grenoble, Lyon et Nice du plan d'attaque des voies de communication, destiné à préparer le débarquement en Normandie.
Le « transportation plan » vise en effet à détruire les infrastructures de chemin de fer, notamment les gares de triage, afin d'empêcher l'armée allemande d'acheminer des troupes et du matériel vers l'ouest de la France. Ce sera 90 jours d’attaques, entre le 6 mars et le 5 juin 1944 sur 80 objectifs prioritaires, en France, en Belgique ainsi qu’en Allemagne.
900 avions américains
Entre 6 et 7 heures du matin, le vendredi 26 mai 1944, par un ciel clair, environ 900 avions américains partent de trois aérodromes de la région de Foggia, dans le sud de l'Italie. C’est une belle journée de printemps et le soleil brille sur Saint-Étienne. Chacun vaque à ses occupations. Rien ne laisse présager que la guerre et ses horreurs vont subitement rattraper notre cité.
À 10 heures, les sirènes retentissent...
10h. Les sirènes hurlent encore dans Saint-Étienne. Beaucoup de Stéphanois pensent qu’il s’agit, une fois encore, d'une fausse alerte. Une de plus.
10h17, les premières bombes tombent et c’est l’effroi dans nos rues ! Environ 1600 bombes sont lâchées par les B17 qui s’abattent, sans interruption, sur la ville pendant 18 longues minutes.
À 10h35, l’alerte est terminée et Saint-Étienne est dans l’accablement.

Ville de Saint-Étienne - Archives municipales
Plusieurs quartiers touchés
Les quartiers de Châteaucreux, de Monthieu, le jardin des plantes, du Soleil, Bel-Air, l’Éparre, le Bardot, et le quartier Saint-François sont touchés. L’église, qui célébrait un mariage, est partiellement détruite faisant une trentaine de victimes, réfugiées dans la crypte.
Parmi les bâtiments civils atteints par ces bombardements, imprécis, figure aussi l’École de Tardy où périssent 8 instituteurs et 24 élèves dont certains, comble de malchance, venaient de l'école Bizillon (actuellement école Jules Ferry), occupée alors par les Allemands et qui avaient été placés à l’Ecole de Tardy.
Un bilan humain terriblement lourd
Communiqué par la mairie à la préfecture le 17 juillet 1944, le bilan, humain et matériel, est très lourd. Les bombes alliées ont provoqué la mort de près de 1000 personnes, dont de nombreux civils et presque une centaine d'enfants ; 2 000 blessés ; 20 000 sinistrés. 250 immeubles ont été entièrement détruits et 550 autres partiellement lors de cette attaque aérienne.
Touché, la gare de triage de Saint-Étienne, l’un des objectifs prioritaires du plan, est utilisable trois jours après moyennant des travaux de déblaiement de jour et de nuit.
La Propagande de Vichy exploitera ce bombardement pour blâmer les Américains et provoquer la visite, le 6 juin 1944, à Saint-Étienne, du Maréchal Pétain, le jour du débarquement des Alliés en Normandie. « Le commencement de la fin » pour ce régime affidé aux Nazis.
Le bombardement de Saint-Étienne reste un traumatisme, une blessure profonde. Mais avec solidarité, entraide, elle s’est relevée de cet acte de guerre qui venait de la toucher au cœur. Le 20 août, la ville était libérée. Cinq jours plus tard, la population stéphanoise pouvait enfin ressortir les drapeaux tricolores et laisser éclater sa joie après quatre sombres années sous le joug nazi.